Le sevrage
Tout cela nous amène au sevrage qui, mené dans le respect de la maturité organique et affective du bébé (on ne sèvre pas de la même manière un bébé de un mois et un enfant de six mois), est une pièce maîtresse de son individuation. C’est quand il y a séparation des deux – mère et enfant – que l’enfant se sent « existable »… Au début de sa vie, il ne le peut pas longtemps, puis, au fur et à mesure qu’il grandit, plus longtemps. C’est dans la distance avec sa mère que les sensations du Moi-Peau, des limites, du contenant mémorisées à partir des différents échanges (soins, portage, alimentation…) lui permettront de se sentir soutenu en lui-même pendant les sevrage et l’absence de la mère. Ce processus fonctionnera d’autant mieux que ces premières sensations auront été suffisantes et sécurisantes.
Du cordon lacté au lien symbolique
Comme nous l’avons vu ci-dessus, du cordon ombilical au cordon lacté, le lien à sa mère se tisse, lien de sang et de chair qui, tout au long du sevrage, se transmue en un lien symbolique qui rassemble et lie tous les objets (sensations, émotions, impressions) intériorisés par le nourrisson en un ensemble cohérent, entier et stable.
Imaginons au fil des jours des couches successives de sensations de sécurité, d’apaisement et le stabilité qui constitueraient un tapis de fond qui, dans les moments de distance qu’impose le sevrage, va être là et œuvrer à lui tout seul pour soutenir le nourrisson. Je fais référence à une mémoire et à une intelligence corporelles, toujours disponibles quoique mises en sourdine. Toutes sensations vécues, agréables ou désagréables, sont indélébiles.
Le sevrage du sein est une étape qui nécessite une préparation. Elle implique la notion du temps, c’est-à-dire prendre son temps pour sevrer son enfant. Au risque d’insister lourdement, le temps permet au bébé d’intégrer la séparation, d’amortir ses propres pulsions d’agressivité, de les réguler grâce aux temps de sécurité dans les bras de sa mère en alternance avec ceux de l’absence.