Galerie de portraits : Le nouveau riche
Le nouveau riche : il existe dans tous les milieux. Le problème c’est sa réussite : il ne s’en remet pas. De son propre aveu « il s’est fait lui-même »… (Il aurait mieux fait de se faire aider). Il n’a de cesse que de vous raconter les étapes de son ascension, il prend à témoin son entourage en racontant pour la énième fois la conquête de son premier client. Pour illustrer son propos, il montre ses jouets qui vont de la grosse cylindrée à la villa de Saint-Tropez, en passant par son handicap au golf et la pêche au gros sur son bateau. Sa fortune n’a d’égale que son absence de générosité. Quand il invite c’est pour son propre plaisir ; le luxe dont il vous fait profiter n’a d’autre objectif que le spectacle qu’il se donne à lui-même de sa propre fortune. Dans son entreprise, il négociera mieux que dans les souks le moindre centime d’augmentation de ses salariés. Il vous expliquera combien vous avez de la chance de gagner 30% de plus que le SMIC en tirant sur son cigare, et il le pense !
Le big-boss : « il n’entend pas ce qu’on lui dit à force d’écouter ce qu’il va dire » (Henri de Régnier).
C’est aussi un cuistre mais l’argent compte moins que sa carrière. Il est encore ébloui d’être sorti de l’ENA, de Polytechnique ou de la cuisse de Jupiter. Le sentiment d’être une élite ne le quittera jamais. Rien ni personne ne le fera dévier de sa propre valeur, la condescendance résume ses rapports humains. S’il daigne vous recevoir, il s’ennuie beaucoup avec quelqu’un de votre niveau et vous le fait sentir. Il a tellement confiance en lui qu’il peut faire confiance à son entourage professionnel, il l’a choisi, et il ne peut pas se tromper. Son grand moment de gloire : le jour où il sera décoré de la Légion d’honneur ou de l’Ordre national du Mérite (au pire). À cette occasion, un de ses pairs dira tout haut tout le bien que lui- même pense de lui-même. Il aura l’occasion d’en rajouter dans son discours de réponse devant un auditoire à son image, avec une fausse modestie qui atteint des sommets de prétention et de narcissisme. Son intelligence formatée l’empêche même de penser, il ne fait que raisonner. Il ruinera des empires avec certitude, distribuera bons et mauvais points avec componction. Il est à l’abri de tout et de tous : on lui a appris à ne surtout pas se remettre en question. Quel que soit son niveau d’éducation et un savoir-vivre artificiel caricatural de son milieu, il est vulgaire de suffisance et enflé de mépris.