Galerie de portraits : Le rond de cuir
Le fond de cuir. Les fautes d’éducation du fonctionnaire sont d’un tout autre ordre ; elles sont provoquées par la conscience qu’il a de sa «permanence professionnelle», nous parlons bien sûr de la sécurité de l’emploi dont il bénéficie et non pas, on l’a bien compris, du temps qu’il passe à assurer ses fonctions. Vous ne trouverez pas plus égalitariste que lui car, à ses yeux, enfants, femmes enceintes, vieillards ou cadres dynamiques doivent bénéficier d’un même traitement : la file d’attente. Il la contemple sans satisfaction particulière mais, simplement, comme une des composantes essentielles de sa mission quotidienne. Son manque de zèle uniformément dispensé frôle à chaque instant l’insulte implicite. S’il vous adresse la parole, il ne vous regarde pas, ce serait marquer de la considération pour autrui or, il n’en a pas. Votre discours n’éveillera pas son intérêt et il n’aura de cesse de vous répondre par une alternative : « Prenez un formulaire ! » ou bien, « Je ne suis pas là pour ça. »
Il n’est pas incorrect dans ses propos, mais son manque d’implication s’assimile à du mépris. Il considère qu’il est le mandataire d’une autorité régalienne et que face à lui vous n’êtes qu’un quémandeur, ce qu’il tient à vous faire savoir. Il ne fixe pas de rendez-vous, il convoque. Il ne s’excuse jamais car il n’est pas responsable. Il ne remercie pas puisque I’ État ne le lui a jamais appris. Il est à votre service sans le savoir. Quand il n’est pas content, il fait grève… L’État, c’est lui.