Transitivisme et nouveau sujet
Qu’est-ce que le transitivisme? Deux exemples cliniques simples y introduisent :
- la prise d’otages d’enfants, et la réaction transitive de leurs parents;
- l’analyste qui éprouve un affect à partir des associations de l’enfant: transféritivisme».
Le transitivisme est comme la négation de l’éprouvé de l’autre.
Satisfaction par un peut définir la logique du transitivisme comme une logique qui le situe entre la iiislaction par un objet hallucinatoire du désir, et la double négation. C’est là une liuiinère de rendre compte de la clinique : un enfant se donne un coup sans réagir (première négation) et c’est un autre qui s’en plaint sans en souffrir (deuxième négation).
L,’objet particulier du transitivisme, c’est un objet qui serait particulier à l’enfant, produit par la fonction maternelle, fonction qui, à un certain temps du désir de I cillant, doit le couper de l’objet hallucinatoire. Il y a donc à cet égard un transiti- ‘ i .ine nécessaire, pour permettre à l’enfant d’avoir droit à un objet réel. La mère peut i «’pendant se fixer dans ce transitivisme, et l’enfant également : cela se produit quand I nul icipation par la mère de ce que l’enfant éprouve, retombe toujours sur la vérification tic l’hypothèse qu’elle avait faite de l’éprouvé de l’enfant. «Si (il se fait)… je oms bien que». Il n’y a plus d’écart tolérable entre ce qu’elle anticipe de son fonc- lliMinement, de son éprouvé, et le fonctionnement, l’éprouvé réels qui pourraient être les siens. L’écart passe par la dénégation. Lorsqu’elle anticipe sans écart, quand elle fixe, on peut se demander si elle ne retourne pas par ce moyen, et grâce au fonctionnement ainsi anticipé de son enfant, à un objet hallucinatoire de son propre désir. l’uns ce cas, l’anticipation «tourne court», c’est-à-dire qu’elle court pour retourner à l’hallucination de l’objet du désir.
D’une façon générale, le transitivisme fait passer le sujet au «nouveau sujet», l’élabore dans Pulsion et destin des pulsions. Son élaboration comprendre et peut-être même reste-t-elle énigmatique, tant qu’on ne la Miutient pas du transitivisme qui l’antécède, voire l’anticipe, nécessairement . Car le sujet « étranger » ou le « nouveau sujet » iliml parle Freud, qu’est-il d’autre que le sujet familier auquel s’identifie le sujet quand il le suppose éprouver du plaisir ou du déplaisir? Le retentissement sur le propre ouvre la question de la réciprocité du jugement de réalité : c’est moi qui tou lire du coup que reçoit l’autre, mais du même coup j’annule le principe de réalité. I c transitivisme est négation du réel éprouvé de l’autre. Le fait que les choses passent le corps propre entraîne dans le transitivisme une réciprocité : je souffre du coup i|nc reçoit l’autre, peut-être sans souffrir… Je crie mais je ne sens rien, mais cela veut
dire que je sais très bien ce qu’est la douleur, que j’attribue à l’autre. C’est là un trail par lequel naît le masochisme.
Le transitivisme peut même aller chez une mère, jusqu’à penser que ce n’est pas elle, mais sa propre mère, qui a accouché de l’enfant dont elle s’occupe. Il y a lù forclusion du Nom du Père.
Il y a une négation propre à la pensée transitiviste, qui est toujours négation du réel éprouvé de l’autre, afin que l’autre éprouve spéculairement et réellement ce qu’il esl supposé devoir éprouver de la part de celui qui le situe dans son transitivisme.
Exemple de Freud montant dans un train et ayant à ce point le désir d’être seul dans le compartiment — il avait payé pour cela — qu’il croit voir un autre l’occuper également, alors que ce n’est que son propre reflet dans un miroir. Négation de sa propre image, soit : hallucination négative de sa propre image (c’est un autre) dans le miroir.
Cela permet d’introduire le rapport du transitivisme avec l’agressivité.
- L’agressivité fait que je ne reconnais pas celui contre lequel je suis agressif au point de ne pas voir son image. «Celui-là, je ne peux plus le voir».
- L’agressivité dans son rapport au Transitivisme : dans la mesure où il y en a un qui prend ma place comme leurre, qui leurre mieux que moi, c’est lui qui aura mal si c’est moi qui me cogne.
- Le psychotique, qui se regarde mais ne se reconnaît pas, au point de se cogner dans le miroir; ce qui peut expliquer ce que l’on observe chez certains schizophrènes qui se tapent la tête contre les murs, apparemment sans douleur : c’est l’autre qui les regarde, qui souffre.
Cela rejoint cette tendance qu’ont les enfants à se plaindre qu’on se moque, ou qu’on risque de se moquer d’eux. Ou bien que l’autre connaîtrait ce qu’ils pensent. 1
Pour que je repère dans l’autre la douleur quand il se cogne, afin que je la manifeste moi-même comme si ma douleur tombait de sa jambe, n’est-ce pas l’exemple d’une circulation d’un éprouvé entre le corps de l’autre et le mien? On revient à la confusion des objets partiels de la mère et de l’enfant.
Ces questions se sont trouvées exposées dans l’actualité récente quand, à l’occasion de la prise d’enfants en otage, nous avons pu constater une position véritablement transitiviste des parents, et la difficulté de la gérer dans le réel.
C’est ainsi que le psychanalyste doit s’interroger sur les obstacles de cet ordre qu’il peut rencontrer dans la conduite de la cure.
Le lecteur de Freud qui connaît l’article Un enfant est battu, peut en faire une autre lecture à partir de cette question du Transitivisme.
Vidéo : Transitivisme et nouveau sujet
https://www.youtube.com/watch?v=jkEebPbHfEU