Quelques affaires célèbres de sorcellerie
Les victimes paysannes des affaires de sorcellerie restent le plus souvent anonymes. A titre de curiosité, mentionnons des procès faits à des animaux : en 1474, un coq est condamné à mort, brûlé vif, accusé d’avoir pondu un œuf. En 1690, un tribunal condamne des chenilles à se retirer d’Auvergne « afin de ne plus faire subir leurs maléfices au pays… »
La sorcellerie atteint aussi les classes nobles. Ainsi Gilles de Rais, un des plus riches seigneurs d’Europe, compagnon de Jeanne d’Arc, pendu à Nantes en 1440, incriminé pour sacrifices d’enfants, est peut-être tout simplement victime de la machination d’un évêque.
Quoi qu’il en soit, Gilles de Rais est entré dans la légende sous le nom de « Barbe-Bleue »…
L’affaire des « possédées de Loudun » se déroule, elle, au 17e siècle. Les pensionnaires du couvent des Ursulines de la ville se disent possédées par le diable, et accusent un prêtre, Urbain Grandier, connu comme séducteur, et surtout mal vu du cardinal de Richelieu. Grandier est arrêté, on découvre sur lui « la marque du sorcier » : une parcelle infime du corps insensible à la douleur. Il finit sur le bûcher en dépit d’une promesse de grâce s’il avouait ses crimes…
La « messe noire », rite parodiant la messe catholique, adoptée depuis par la sorcellerie moderne, est peut-être une invention de Catherine Montvoisin, dite « La Voisin », célèbre tireuse de cartes opérant à Paris en ce même 17e siècle. Elle est l’héroïne d’une série d’affaires criminelles qui s’étalent sur dix ans, de 1670 à 1680. Aidée de complices, elle organise des cérémonies nocturnes impressionnantes, à grand renfort de cierges noirs, de doigts de pendus, de crapauds, et même de cadavres de nouveau-nés. Des sortilèges sont jetés contre un mari gênant, un ennemi, et aussi contre le roi de France, car on retrouve dans la clientèle de La Voisin des personnages connus de la cour : la duchesse de Bouillon, le maréchal de Luxembourg, et la marquise de Montespan, favorite de Louis XIV…
Pour plus d’efficacité, La Voisin vend des poisons. Démasquée malgré sa prudence, elle est brûlée vive… Le scandale produit par cette affaire, connue sous le nom de « l’affaire des poisons », fait prendre au roi une ordonnance Sur les sortilèges « défendant toutes pratiques superstitieuses… »
Ce qui n’empêche pas, quelques années plus lard, Madame de Pompadour, favorite de Louis XV, de s’échapper la nuit du Louvre, pour connaître son avenir chez une « sorcière », liseuse dans le marc de café.
Ce qui précède concerne surtout la France et l’Europe occidentale. Ailleurs, la sorcellerie revêt des aspects très différents.
Ainsi une légende raconte le maléfice des cordes à trois nœuds vendues par les sorciers nordiques aux navigateurs. Le premier nœud défait, se levait une légère brise. Au deuxième, un vent plus fort. Mais au troisième, se déchaînait une terrible tempête…
Ailleurs
Sur d’autres continents, la sorcellerie n’a rien à voir avec un prétendu pacte passé avec le diable ; sorciers et magiciens se confondent, remplissant les mêmes attributions.
Dans l’Afrique animiste, par exemple, on croit en un monde dont les êtres vivants et la nature (arbres, rivières…) sont habités par des esprits et des forces cachées qu’il convient de neutraliser et d’influencer favorablement par un rituel magique.
C’est l’affaire, entre autres, de « forgerons- féticheurs », jouant un rôle important de conseillers de chefs et de devins. On peut lire à ce sujet le récent roman de Maryse Condé : Ségou dont l’action se situe au 18e siècle, entre Bamako et Tombouctou, dans l’actuel Mali.
Le « chaman » (celui qui est bouleversé) des tribus Peaux-Rouges d’Amérique « n’est pas
comme tout le monde ». « Fou possédé des dieux », sa vocation se manifeste dès l’enfance par un comportement particulier. Il sert à la fois d’homme-médecine, de psychanalyste, d’inter-1 prête des songes, et d’intermédiaire entre les esprits et les hommes…
Toute l’activité de l’Indien se faisant en suivant j des rites précis, c’est dire, là aussi, l’importance exceptionnelle des « grands sorciers ».’