Les troubles obsessionnels dans la perspective comportementale
Dans la perspective comportementale actuelle, on essaie d’expliquer le développement et la persistance des troubles obsessionnels à partir de deux théories. La conception probablement encore la plus répandue part de la théorie des deux facteurs proposée par Mowrer (1939) pour expliquer le développement et la persistance de l’anxiété et du comportement d’évitement.
Selon cette théorie, un événement neutre (stimulus) devient un stimulus aversif (c’est-à-dire un événement désagréable, premier facteur) par son association à une réaction anxieuse. Par la suite la personne apprend à éviter cet événement aversif conditionné afin de diminuer ou d’éviter l’anxiété. Ce comportement d’évitement sera renforcé (négativement) par la non-occurrence de l’événement aversif attendu (deuxième facteur). Les troubles obsessionnels deviennent ainsi un comportement d’évitement instrumental (Dollard & Miller, 1950 ; Metzner, 1963), qui peut alors se développer et se consolider par généralisation (c’est-à-dire par généralisation et par extension à d’autres événements).
Cette théorie étiologique est étayée par des expériences animales qui ont montré que les animaux développaient des comportements d’évitement et des rituels lors de la première phase (confrontation avec un stimulus aversif)- Ceux- ci ont été conservés pendant longtemps dans le répertoire comportemental sous forme de comportements d’évitement et de rituels stéréotypés, et cela bien qu’il y ait eu des possibilités d’extinction (c’est-à-dire malgré l’absence de conséquences négatives).
La transposition de cette théorie des deux facteurs aux troubles obsessionnels chez l’homme rencontre cependant plusieurs problèmes à la suite des-quels des modifications ont été proposées. D’abord, le conditionnement de ces troubles ne se fait pas, comme Rachman et Eysenck l’ont déjà fait remarquer à propos des phobies, dans n’importe quelle situation, mais en fonction de leur signification biologique et évolutive. C’est ce qu’indique le concept de préparation (preparedness)de Seligman (1970). De plus, dans beaucoup de troubles obsessionnels comme dans beaucoup d’agoraphobies, il n’est guère possible de retrouver l’événement aversif originaire de la première phase. En deuxième lieu, cette théorie ne tient pas suffisamment compte des composantes cognitives des troubles obsessionnels.
La théorie cognitive du développement des troubles obsessionnels essaie de compenser ce déséquilibre. Elle part de l’observation clinique montrant que les patients obsessionnels vivent dans un monde de l’insécurité et du doute et qu’ils ont une expectation anormalement élevée d’événements négatifs (Carr, 1974), qu’ils vivent donc avec des systèmes cognitifs inadéquats (dysfonction- nels). Me Fall & Wollersheim (1979) ont étudié quelques-unes de ces convictions inadéquates et pensent qu’elles conduisent à une perception erronée de menaces qui, à son tour, produit de l’anxiété.
Bien que les différentes hypothèses de travail de la théorie cognitive des troubles obsessionnels cernent de plus près quelques composantes importantes des troubles obsessionnels, elles ne répondent pas à la question importante concernant l’origine de l’insécurité et l’expectation élevée d’événements négatifs. Elles ont de plus besoin d’une meilleure confirmation.