Les thymoregula teurs
Définition :
Les thymo-régulateurs ou normo-thymiques sont des médicaments capables de prévenir les récidives dépressives et/ou maniaques des troubles récurrents de l’humeur (psychose maniaco-dépressive). Ils ont en outre en commun d’être efficaces pour le traitement curatif de l’accès maniaque.
Les thymo-régulateurs sont représentés essentiellement par les sels de lithium mais également par les anti-comitiaux à action thymo-régulatrice (carbamazépine et acide valproïde).
Les sels de lithium :
Le sel de lithium disponible en Tunisie est : le carbonate de lithium (Téralithe®), comprimé à 250 mg.
Les sels de lithium sont administrés per os :
- traversée haute (estomac et duodénum) du tube digestif
- large diffusion
- filtration rénale à 100% avec réabsorption tubulaire à 75%. Eliminatior principalement rénale.
Indications psychiatriques du lithium:
Les indications psychiatriques
La prophylaxie du trouble bipolaire (psychose maniaco-dépressive)
Le lithium réduit la fréquence des rechutes maniaques et/ou dépressives jusqu’à les supprimer. L’action prophylactique nécessite une iithiémie piasmatique entre 0,6 et lmmol/I (ou mEq/t) En deçà de cette fourchette, le lithium est inefficace, au delà, il est toxique. En pratique, le lithium sera introduit quand la maladie aura fait la preuve de sa récidive c’est-à- dire à partir du 2eme ou 3eme accès.
L’accès maniaque
Le délai d’action de deux semaines du lithium impose d’adjoindre un neuroleptique.
La prophylaxie du trouble schizo-affectif (schizophrénie dysthymique)
En association avec les neuroleptiques.
La prophylaxie du trouble unipolaire (trouble dépressif récurrent) ;
L’action anti-agressive
D’autres Indications psychiatriques sont discutées :
• Un effet anti dépressif (il est surtout montré que le lithium peut potentialiser l’action des médicaments antidépresseurs et moins bien établi qu’il puisse être antidépresseur en monothérapie) ;
• Le trouble bipolaire de l’enfant
• Un effet prophylactique sur les conduites alcooliques et les toxicomanies 2.1.2. Indications non psychiatriques
• Certaines formes d’hyperthyroïdie
• Algies motrices de ia face
• Chimiothérapie des neutropénies
Les effets indesirables
Les effets indésirabes du lithium sont fréquents, dose-dépendants et réversibles après ajustement de la posologie (excepté le syndrome poiyuropoiydipsique et la prise de poids).
Neurologiques :
• Tremblements +++ d’attitude et d’action pouvant survenir à toute étape de traitement et justifiant de réduire la posologie. Ces tremblements peuvent être corrigés par les (3-bloquants (Avlocardyl ®) mais sont insensibles aux antiparkinsoniens de synthèse ;
•Rigidité extrapyramidale chez le sujet âgé ;
Crises convulsives (rares)
Digestifs :
Nausées, vomissements, diarrhées. S’ils ne sont pas liés à une hyperlithiémie, le fait de prendre le traitement au milieu des repas peut être une mesure suffisante.
Cardiovasculaires :
• Modifications de la repolarisation (aplatissement de l’onde T) ;
• Troubles du rythme : la bradycardie sinusale en est la manifestation de la plus fréquente. Elle est réversible à i’arrêt du
traitement.
Endocriniens :
• Hypothyroïdie, qui n’est pas une contre-indication mais impose une opothérapie substitutive (par L-Thyroxine par exemple)
• Goître thyroïdien ;
• Hyperparathyroïdisme
Métaboliques :
• Baisse de la sécrétion d’insuline ;
• Prise de poids dont le meilleur traitement est la prévention par régime hypoglucidique.
Hématologiques :
• Hyperleucocytose fréquente ;
Cutanés :
• Rash cutané ;
• Acné et réactions acnéiformes ;
• Psoriasis.
h. Rénaux :
Le syndrome polyuro-polydipsique concerne 30 à 40p. 100 des patients. Il se manifeste d’abord par la nécessité de se lever une à deux fois par nuit pour uriner. Ce syndrome, parfois sévère, est du à une insensibilité des cellules du néphron à l’hormone antidiurétique. Le seul traitement est préventif : l’administration des sels de lithium en une seule prise par jour (vespérale) entraîne moins d’altération des capacités rénales de concentration des urines.
Tératogènes :
Il s’agit surtout de malformations cardiaques (avec risque d’enfants morts à la naissance) et vélopalatines. La tératogénicité a probalement été surestimée. Les recommandations sont aujourd’hui les suivantes :
vérifier lors de la prescription si la femme a une contraception efficace ; en cas de survenue de grossesse sous lithiothérapie, envisager avec le couple une interruption de grossesse : celle-ci ne peut être systématique étant donné le caractère limité du risque.
Contre-indications a la lithiotherapie Absolues :
• Insuffisance rénale sévère ;
• Insuffisance cardiaque évoluée ;
• Désordres hydro-électrolytiques ;
• Régime désodé.
Relatives :
• Premier trimestre de la grossesse ;
• Infarctus récent du myocarde ;
• Affection rénale ;
• Epilepsie ;
• Hypertension artérielle.
L’intoxication au lithium :
Les symptômes pré-toxiques surviennent pour des lithiémies entre 1,5 et 2 mMoi/l : e somnolence
• irritabilité
• vertiges et bourdonnement d’oreilles, vision fioue
• troubles digestifs ; vomissements, diarrhées, douleurs abdominales
• tremblement ample, irrégulier pouvant toucher l’ensemble du corps et s’accompagner de dysarthrie
• à ce stade, l’EEG montre une activité thêta ample.
L’intoxication confirmée correspond à des lithiémies de 2 à 3Mmol/l.
• Troubles de la vigilance allant jusqu’au syndrome confusionnel avec illusion ou hallucinations psychosensorieiles,
symptômes cérébelleux,
• mouvements choréo-athétosiques,
• ROT, vifs, symétriques ou non,
• hypertonie musculaire puis hypotonie,
• crise épileptique.
La survenue d’un état comateux peut aboutir à la mort ou à des séquelles neurologiques irréversibles.
L’intoxication légère (moins de 2 mmol/I) nécessite un arrêt immédiat du traitement avec apport hydrosodé. Au-delà , le sujet doit être transporté en réanimation, où seront évaluées les stratégies thérapeutiques : lavage d’estomac, diurèse osmotique avec alcalinisation des urines voire diurèse péritonéale ou hémodialyse.
Mise en route d’une lithiotherapie :
Le bilan préalable à la mise en route d’une lithiothérapie a trois objectifs :
• éliminer une contre-indication ;
• évaluer la capacité fonctionnelle du rein ;
• apprécier la qualité des appareils sur lesquels le lithium peut avoir une incidence : cœur, thyroïde, métabolisme du sodium.
Examens indispensables ;
• azotémie, créatininémie, glycémie, Na+, K+, NFS, VS ;
• protéinurie, glycosurie ;
• test de grossesse : il faut s’assurer chez une femme pour qui on envisage une prescription de lithium qu’elle n’est pas enceinte, et envisager avec elle une méthode contraceptive.
- ECG
- EEG
- T3,T4, TSH
Déroulement du traitement
On commencera toujours le traitement progressivement. On prescrit habituellement une première prise de 1 cp (250 mg) de carbonate de lithium (téralithe*) le soir avec augmentation progressive de la dose jusqu’à 3 ou 4 cps par jour (750 à 1000 mg) en deux prises par jour, matin et soir. Aucun traitement par ies sels de lithium ne saurait être instauré sans contrôle des concentrations sanguines de lithium (lithiémie). En effet, la très faible marge entre concentrations thérapeutiques et concentrations toxiques rend indispensable ce contrôle. La lithiémie doit être maintenue entre 0,6 et 1 meq/l, la concentration optimale se situant pour la plupart des auteurs autour de 0,70 meq/l. Les dosages doivent être effectués 12 heures après la dernière prise de lithium ; leur fréquence initiale sera bihebdomadaire, puis hebdomadaire, mensuelle et, après 6 mois de traitement, trimestrielle (du moins en cas de stabilité du métabolisme du lithium).
On pratiquera une fois par an un ECG, une NFS, un ionogramme et un bilan thyroïdien.
Les autres thymoregulateurs
La carbamazepine
• La Carbamazépine est disponible sous deux formes : Tégrétol, comprimé à 200 mg et Tégrétol LP 200 et LP 400.
• Son indication est l’accès maniaque et la prévention des récurrences bipolaires résistantes au lithium. Ce produit trouve son indication en particulier dans Sa psychose maniaco-dépressive à cycles rapides qui répondrait moins bien à la lithiothérapie .
• Les anti-comitiaux sont indiqués chez les malades qui auraient tendance à avoir une mauvaise observance thérapeutique.
• Les contre-indications sont celles des tricycliques imipraminiques (= famille du Tégrétol), en particulier le bloc auriculoventriculaire et le trouble hématologique. L’association est interdite avec l’acide vaiproïque (neurotoxicité ++)
• La posologie est progressive pour atteindre un taux plasmatique de 4 à 12 mg/mi.
• Il faut savoir que le Tégrétol® est un inducteur enzymatique : vérifier le taux plasmatique après quatre semaines de traitement et faire attention à certaines interactions (accélération du catabolisme des hormones, d’où disparition éventuelle de la contraception ; accélération du catabolisme des neuroleptiques, des anticoagulants).
• Les effets indésirables sont ceux des imipraminiques ; attention au risque tératogène.