Les solutions aux débuts difficiles d'allaiement
Pour beaucoup de femmes, choisir d’allaiter est un acte courageux. L’allaitement, en les engageant dans leur corps, peut réactualiser l’enfant douloureux qui les habite toujours. Où vont-elles, elles qui ont été peu ou mal nourries d’amour, puiser le désir de nourrir leur enfant « d’amour et de lait » ?
J’ai envie d’allaiter, mais… pourquoi est-ce si difficile ?
Le corps, porte-parole du psychisme, va résister, avancer puis reculer ; il va confronter la mère à ses manques, ses peurs et ses doutes, mais aussi, simultanément, lui permettre de restaurer l’enfant qui pleure en elle. Il est important, dans un tel cheminement, d’être bien accompagnée. Par le père d’abord, qui, lui aussi va se trouver renvoyé à sa propre enfance.
Choisissez de grandir ensemble. Parlez beaucoup, massez-vous, caressez-vous. En faisant appel au toucher, vous allez vous renourrir, vous réconforter, vous apaiser, puiser confiance en vous.
Vous pouvez aussi cherchez le soutien d’une « mère positive » – amie, famille, personne de bon conseil, d’écoute éclairée (sage- femme, puéricultrice…) – ou, si vous en sentez la nécessité, adressez-vous à une personne dont c’est le métier (psychologue, psychothérapeute… )
J’ai mal quand j’allaite. Est-ce normal ?
Entre la sensibilité et la douleur, les sensations, nous le savons, sont très variables d’une personne à l’autre. Le mouvement de succion du bébé est puissant, il surprend toujours par sa force. Observez votre réaction. Est-ce que la surprise vous fait reculer ? Est-ce que l’avidité de votre petit vous met mal à l’aise ? Puis réfléchissez à votre sensation : est-ce que l’inquiétude de ce contact vous fait tapir dans votre corps ? Vous fait-elle vous éloigner de cette « frontière peau » que votre enfant envahit avec la puissance de son désir ?
Le mamelon est toujours sensible, voire douloureux, lors des premières tétées. Certaines peaux sont plus fragiles que d’autres. L’éjection du lait ne vient qu’après quelques minutes d’aspiration de l’enfant ; ce moment délicat où bébé amorce la tétée est souvent le plus douloureux. En effet, à l’aspiration puissante ne répond pas encore la détente de l’éjection qui décontracte les tissus. Le mamelon est alors fortement étiré. Si vous vous sentez, au fond de vous, en accord avec cet étirement et si vous restez présente dans votre poitrine jusqu’à l’extrémité de vos seins, vous accompagnez le mouvement ; sans pousser en avant et en accord (à-corps) avec la tétée, vous allez favoriser l’éjection du lait. Avec la sensation du lait qui coule, la tension mammaire s’apaise. Il s’instaure ensuite un rythme d’étirement-relâchement des tissus qui n’est pas, ou peu, douloureux.
Plus tard, il devient même au contraire très agréable. Si, pendant cette première étape de recherche d’« expression » du lait, vous restez « impressionnée » et si, face à la douleur du contact, vous vous retirez loin de cette région de votre corps, vous imprimez nécessairement au mamelon une force opposée à son étirement et, immanquablement, les tissus souffrent.
Il est absolument normal, lors de ces premiers contacts corporels avec l’enfant, que vous soyez chamboulée et que votre timidité s’exprime. La réalité du contact corporel n’est pas toujours celle que vous imaginiez pendant votre grossesse. Même si vous étiez décidée à allaiter, en découvrant l’enfant réel, la naissance détrône l’enfant imaginé. Ce dernier, nécessaire, a joué un rôle actif dans votre évolution au cours de la grossesse. Soyez persévérante. Vos frontières corporelles vont s’affermir. Massez vos seins régulièrement pour venir les habiter et les aimer dans leur nouvelle définition, pour en dessiner les frontières dans votre sensation interne et non par l’intermédiaire d’une glace. À cette occasion, utilisez une huile de germe de blé.
Il est indispensable de préserver l’intimité de vos premiers contacts avec votre enfant. Prenez le temps de vous apprivoiser mutuellement, vous dans votre timidité et lui dans son élan vital. Souvenez-vous du renard qui guide le Petit Prince. Faire « co-naissance » demande une progression dans le temps.
Dans le prolongement de la tétée, observez- vous à nouveau. Est-ce que vous vivez un moment d’échange ? Est-ce que vous vous sentez chaude au-dedans de vous ? Plus tard, cela risque-t-il de devenir plus difficile pour vous ? Sentez-vous une résistance vous envahir ? Ce moment vous paraît trop long et vous perdez patience avant de vous retirer de l’échange ? Ce moment-là, aussi, est à respecter. Si vous vous sentez trop en désaccord (des-à-corps), peut-être vaut-il mieux finir la tétée. Tout de suite mais sans bousculade.
Une fois le contact sein-bouche interrompu, bébé est dans vos bras, ou bien confié au relais paternel, ou encore allongé dans le lit. Avant de quitter cette étape, écoutez encore une fois vos sensations et faites un nouveau tour de votre corps. Promenez- vous en pensée sur les contours de votre corps jusqu’à vous sentir unie dans votre enveloppe et reliée à vous-même. Un soupir, une respiration profonde vous confirment que vous êtes bien : en vous. Si vous êtes plongée dans cette écoute de vous-même, les tétées vont progressivement s’allonger sans provoquer de douleur. Quand les douleurs se seront estompées et que votre présence s’accordera à la demande de votre bébé, prenez garde de rester attentive, pour ne pas rigidifier le contact. Ainsi, ne tombez pas dans le piège de chronométrer les tétées, par exemple.
Si la douleur demeure trop forte et ne vous permet pas de rester présente à ce contact, vous pouvez essayer les protège-mamelon en silicone. Débarrassée de la douleur, mettez- vous dans cette écoute de la tétée, familiarisez-vous avec les mouvements intérieurs de votre corps. Progressivement, à votre convenance, vous retrouverez des tétées sans pro- tège-mamelon. Les premiers jours sont le temps des accordailles ; suivez leur rythme mais non dans une image de vous-même. Au vouloir être comme ci ou comme ça, substituez l’écoute de votre sensation, la réalité exprimée par votre corps. La qualité de votre présence intérieure évolue avec votre capacité à habiter le présent. En respectant profondément votre rythme, vous permettez à votre enfant d’accéder au sien.
Pourquoi refuse-t-il le sein ?
Cela arrive quand l’enfant n’a pas la force nécessaire pour pratiquer la succion, qui est un mécanisme très puissant.
Est-il fatigué de la naissance ? prématuré ? de petit poids ?
De même, cet incident arrive quand l’enfant a bu un biberon car celui-ci n’impose pas le même effort de succion que la tétée au sein. Soyez persévérante et patiente : vous traversez une situation délicate. Il est frustrant, pour une mère, de se voir refuser le lait de son corps, soyez-en consciente et prenez du recul, car votre frustration ne ferait qu’aggraver la situation. En revanche,
Le refus du sein survient aussi quand la mère a utilisé une crème ou un parfum qui trouble son odorat : l’enfant ne reconnaît pas l’odeur du lait maternel.
La relactation
« J’ai changé d’avis. Je l’ai nourri au biberon, ou en allaitement mixte, et maintenant j’aimerais bien le nourrir uniquement au sein. Est-ce possible ? »
« J’ai été séparée de mon enfant et je désire démarrer ou poursuivre l’allaitement. »
On peut toujours stimuler à nouveau une sécrétion lactée peu abondante. Pour cela, restez au lit avec bébé pendant quelques jours. Laissez-le téter aussi souvent qu’il le désire. Cette seule succion fréquente permettra, en quelques jours, de réamorcer la lactation. Dormez quand il dort. Favorisez le peau à peau, stimulez son oralité : massez et caressez avec douceur ses lèvres, le tour de sa bouche, ses mâchoires, glissez le mamelon contre sa bouche. Buvez selon votre soif. Dans les deux à trois semaines qui suivent l’accouchement, il suffit de cesser les prises de médicaments « coupe-lait » pour que celui-ci revienne. La composition de ce médicament n’est pas nocive pour bébé. Nourrissez-vous bien, en adoptant une alimentation saine et enrichissante. Demandez vos petits plats préférés. Faites-vous dorloter, entourez-vous de gens que vous aimez,demandez au père de votre enfant de vous protéger de ceux qui doutent.
Pour démarrer l’allaitement au sein lors de la première semaine, la seule mise au sein fréquente est en principe suffisante. Si votre montée de lait n’a pas eu lieu, elle se déclenchera lorsqu’elle aura été provoquée par la tétée. Si l’enfant, déjà habitué à la tétine, a du mal à téter, reportez-vous à la question « Pourquoi refuse-t-il le sein ? » (page 96). Parlez-lui, expliquez-lui la situation. Diminuez progressivement les biberons. Sans, bien sûr, le laisser hurler, mettez-le en situation d’avoir faim : ainsi il sera motivé pour ce mode de succion beaucoup plus difficile. Préférez des tétines au très petit trou ou à la cuillère ou encore à la tasse. Si la mise au sein s’avère difficile, vous pouvez vous procurer un « lact-aid » : ce biberon que la mère porte autour de son cou est muni d’un petit conduit que l’on glisse dans la bouche de l’enfant et qui lui permet, grâce à un système de compte-gouttes, de recevoir du lait tout en tétant le sein maternel, le temps du démarrage de la sécrétion lactée. Vous pouvez aussi simplement utiliser un compte- gouttes.