Les anxiolytiques
Introduction – définition
Les anxiolytiques désignent la catégorie de médicaments psychotropes dont le symptôme cible principal est l’anxiété, dans ses manifestations psychiques et somatiques.
Le champ d’utilisation des anxiolytiques ne cesse de s’accroître ces dernières années aboutissant parfois à une surconsommation de ces produits ce qui implique une meilleure connaissance des règles de leur prescription.
Classification chimique
Les anxiolytiques peuvent être classés en 2 catégories :
– Les benzodiazépines
– Les anxiolytiques non benzodiazépininiques
Les benzodiazepines
Le chef de file des benzodiazépines est représenté par le Diazépam (Valium®).
On connaît d’autres molécules comme : Lorazépam (Temesta®) – Bromazépam (Lexomil®) Clobazam (Urbanyl®) – Prazépam (Lysanxîa®).
Elles possèdent en commun cinq propriétés :
• action anxiolytique
• action sédative
• action myorelaxante
• action anti-convulsivante
• action amnésiante
Un phénomène de tolérance et de dépendance est possible lors d’un traitement prolongé par les benzodiazépines.
Un syndrome de sevrage peut apparaître à l’arrêt de ces médicaments.
Les anxiolytiques non benzodiazepiniques
Issu de la famille des carbamates, le méprobamate (Equanil) premier anxiolytique spécifique à avoir été utilisé est également sédatif et myorelaxant.
Les anti-histaminiques : (hydroxyzine Atarax) s’ils n’ont pas une efficacité anxiolytique aussi constante que les benzodiazépines, n’ entraînent en revanche ni dépendance ni phénomène de sevrage. Leurs propriétés sédatives et leurs effets anti-cholinergiques en limitent l’usage. On pourra les réserver aux sujets qui présentent des tendances addictives.
Les agonistes 5-HT1A : ils sont représentés par la Buspirone (Buspar®)(non commercialisée en Tunisie). Elle est indiquée dans le trouble anxieux généralisé. Ses avantages sont : L’absence de tolérance et de dépendance.
Ses inconvénients sont un délai d’action de 15 jours environ et une efficacité moindre chez les sujets anxieux ayant déjà tiré bénéfice des benzodiazépines.
Autres anxiolytiques non benzodiazépiniques :
• Certains antidépresseurs sédatifs (amitriptyline Elavil- Laroxyl)
• Petites doses de phénothiazines (lévomépromazine Nozinan)
Pharmacocinetique et metabolisme
Les benzodiazepines
l’absorption des benzodiazépines lors de l’administration par voie orale est rapide à exception du Prazépam (Lysanxia ®) et presque complète.
Elles franchissent aisément toutes les barrières hémato-encéphalique et foeto-placentaire et passent dans le lait.
Leurs caractéristiques pharmacocinétiques permettent de classer les différentes molécules en fonction des vitesses auxquelles elles sont absorbées et métabolisées.
On distingue trois groupes :
Les benzodiazépines à demi-vie longue 24 heures :
- Prazépam = Lyscnxia ®
- Clorazépate = Tranxène ®
- Clopazam = Urbanyl ®
Les benzodiazépines à demi-vie intermédiaire comprise entre 5 et 24 heures : Lorazépam = Temesta®
Bromazépam = Lexomil®
Les benzodiazépines à demi-vie brève inférieure à 8 heures Oxazépam = Seresta®
Anxiolytiques non benzodiazepiniques
Le méprobamate (Equanil ®) est bien résorbé et sa demi-vie plasmatique est d’environ 10 heures.
Il a aussi la particularité d’être inducteur de son propre métabolisme ce qui explique l’apparition d’un phénomène de tolérance aux effets thérapeutiques du produit surtout dans les traitements prolongés.
L’hydroxyzine (Atarax®) : sa demi-vie est longue pouvant aller de 19 à 39 heures.
La Buspirone (Buspar®) fait l’objet après sa résorption, d’un important effet de premier passage hépatique. Sa demi-vie d’élimination est de 5 à llheures.
Indications des anxiolytiques
Les anxiolytiques agissent sur les manifestations subjectives, émotionnelles et somatiques de l’anxiété, sans préjuger de leur étiologie.
Ils sont utilisés en psychiatrie mais aussi en médecine ou en chirurgie pour toutes les affections où le stress et l’anxiété peuvent jouer un rôle étiologique ou aggravant.
Indications en psychiatrie
Les indications principales
Attaque de panique ou crise d’angoisse aiguë : +++
Les benzodiazépines sont indiquées. L’administration par voie orale est préconisée en raison de leur absorption rapide. Exemple : Lorazépam (Témesta®).
Cependant, la voie musculaire est utilisée surtout pour son impact psychologique (malgré une absorption plus irrégulière). Exemple : Clorazépate dipotassique (Tranxène ®).
Dans l’anxiété généralisée avec ses manifestations psychiques et physiques.
Elle reste une indication privilégiée des anxiolytiques.
On préconisera une benzodiazépine à demi-vie longue en une seule prise journalière pour un effet anxiolytique prolongé et une meilleure observance thérapeutique. Exemple = Prazéparn (lysanxia
Il est toujours important de choisir un produit adapté à la vie socio-professionnelle du patient, l’effet sédatif devant être évité à tout prix chez les sujets actifs.
Troubles de l’adaptation avec humeur anxieuse, réactionnels à un changement de vie important (déménagement, rupture sentimentale, agression …) ou aux autres stress socio-pro;ëssionnels peuvent justifier un traitement anxiolytique qui n’excédera pas 6 à 8 semaines
Syndrome de stress post-traumatique qui peut être aussi amélioré par les anxiolytiques.
• Anxiété accompagnant les troubles somatomorphes (hypochondrie).
• Anxiété secondaire à des affections organiques
• Sevrage alcoolique
Ils constituent un traitement de choix des épisodes aiguës et subaiguës du sevrage éthylique, notamment du fait de leur sécurité d’empioi et de leurs propriétés anti- convulsiviantes.
L’utilisation prolongée chez l’alcoolique ou le toxicomane doit par contre être discutée, en raison du risque de potentialisation par l’alcool et de survenue de phénomène de dépendance.
Les indications de deuxième intention
C’est essentiellement le trouble panique avec ou sans agoraphobie. Les anxiolytiques ne sont pas le traitement de fond : ce sont les anti-dépresseurs qui représentent le pilier du traitement de ce trouble.
Les indications de traitement d’appoint
• Les états dépressifs avec symptomatologie anxieuse
L’anxiété et ia dépression entretiennent des liens étroits. Utilisés seules, les anxiolytiques sont inefficaces dans le traitement de la dépression mais leur association au traitement anti¬dépresseur est souvent nécessaire dans la prévention du risque suicidaire concomittant à la levée de l’inhibition.
Les anxiolytiques à demi-vie longue ou intermédiaires sont préconisés. Ils seront prescrits pour une durée limitée : environ de 08 semaines avec une dégression progressive de leurs posologies.
Phobies simples, phobies sociales, troubles obsessionnels- compulsifs
Les benzodiazépines sont un traitement d’appoint qui doit être associé à d’autres traitements plus spécifiques comme les anti-dépresseurs et ou la psychothérapie.
Certains états psychotiques
Dans les psychoses aiguës, les benzodiazépines par voie injectable peuvent contribuer également à ia sédation de la symptomatologie sans avoir une activité proprement antî- Dsychotique. Exemple : Clorazepate dipotassique (tranxène®) – Lorazépam (Témesta®) teur utilisation est surtout intéressante dans les psychoses stabilisées où elles permettent parfois de réduire la posologie et les effets indésirables des neuroleptiques.
les benzodiazépines sont également efficaces sur certaines manifestations extrapyramidales impatience). Exemple : Diazépam (Valium®).
Les indications medicales
Epilepsie
Le diazépam reste le traitement de choix de l’état de mal épileptique. Une autre Denzodiazépine, le clonazépam (Rivotril®),peut être indiquée dans certains troubles comitiaux y compris les absences et le petit mal.
Pathologie psychosomatique et activité myorelaxante
Plusieurs affections somatiques s’accompagnent d’importantes contractures musculaires en oarticulier le tétanos, nécessitant une prescription de benzodiazépine.
Le tétrazépam (Myolastan ®) est utilisé en rhumatologie où il est proposé comme traitement d’appoint de nombreuses affections douloureuses.
Anesthésioloaie
Les benzodiazépines sont aussi employées comme adjuvants en anesthésiologie pour leurs propriétés sédatives et anxiolytiques.
Certaines explorations en particulier endoscopiques nécessitent une prémédication de benzodiazépines.
Effets secondaires et toxicite
Les benzodiazepines
Elles font partie des psychotropes les mieux tolérés et on ne leur connaît pas à ce jour de réelle toxicité.
Effets à court terme
Sédation et altération des facultés psychomotrices.
Le risque de sédation et de somnolence diurne dépend de la dose administrée.II est potentialisé par la prise conjointe d’alcool et augmente avec l’âge.
L’effet sédatif est souvent transitoire en début de traitement en raison d’une tolérance qui se développe rapidement. Il peut être évité par une diminution de la posologie.
En prise unique, les effets négatifs sur la conduite automobile n’apparaîtraient que pour des doses supérieures ou égales à l’équivalent de 10 mg de diazépam.
Les troubles mnésiques et cognëtifs
Apparaissent lors des premières prises et ont tendance à disparaître au long cours.
Une excitation paradoxale
Augmentation de l’agressivité et subexcitation, serait favorisée par la prise d’alcool.
. Effets à long terme ® Dépendance :
Elle est fréquente et liée à la prescription très répandue de ces molécules. La dépendance est d’installation plus rapide quand les molécules possèdent une demi-vie brève.
Le sevrage :
Les phénomènes de sevrage peuvent associer une irritabilité, une anxiété, des myalgies, des tremblements, une insomnie ou des cauchemars, des nausées ou des vomissements. La dégression progressive des doses peut éviter les accidents de sevrage.
Les intoxications aiguës
Le plus souvent, dans un but suicidaire, elles se manifestent par un état ébrieux initial avec dysarthrie, ataxie, vertiges évoluant secondairement vers un coma hypotonique, aréflexique et hypothermique. L’antagoniste spécifique des récepteurs aux benzodiazépines est le Flumazénil (Anexate®).
Les anxiolytiques non benzodiazepiniques
Les carbamates
En dehors des somnolences diurnes ou des réactions allergiques, ils entraînent une dépendance psychologique et physique beaucoup plus nette que les benzodiazépines.
A l’arrêt, surtout lorsqu’il est brutal, on peut observer des manifestations de sevrage pouvant aller jusqu’à la confusion mentale ou la crise comitiale, Buspirone
Les effets indésirables mis en évidence sont fréquemment des gastralgies et des sensations vertigineuses.
Contre indications
Contre indications absolues: Les propriétés myorelaxantes des benzodiazépines les contre indiquent formeilement chez les sujets atteints de myasthénie.
Contre indications relatives
• L’insuffisance hépatique
• L’insuffisance respiratoire décompensée +++
Chez la femme enceinte, bien que le risque tératogène n’ait pas été démontré on recommande de rie pas administrer d’anxiolytiques au cours des trois premiers mois de la grossesse.
De la même manière, si une prescription prolongée s’avère nécessaire, on réduira les posologies au cours du dernier trimestre. Les molécules à demi-vie courte sont préconisées afin de réduire le risque d’hypotonie et de difficultés respiratoires à la naissance,
Les precautions : doivent etre respectees chez
• Les conducteurs d’automobiles ou de machines-outils.
• les sujets ayant une appétence toxicomaniaque.
• le sujet alcoolique
• le sujet âgé +++
La posologie doit être réduite de 1/3 voire de V2 par rapport à celle indiquée chez le sujet adulte. On sera particulièrement vigilant quant au risque de chutes et aux interactions -lédicamenteuses (Le sujet âgé est très souvent poiy-médicamenté).
Modalites de prescription.
Comment prescrire un anxiolytique ?
Les benzodiazépines sont généralement des médicaments bien tolérés. Cependant, leur administration doit se conformer aux règles générales suivantes :
1. Hormis dans des situations d’urgence (attaque de panique), les médicaments en début de traitement, doivent être prescrits aux posologies les plus faibles.
2. Si nécessaire, ces posologies seront progressivement augmentées.
3. Le patient doit être informé des risques de somnolence diurne, surtout en début de traitement, et de leur potentialisation par la consommation d’alcool et/ou la prise concomitante d’autres psychotropes. Le risque potentiel d’accidents de travail ou de la circulation doit également être pris en considération.
4. La durée de prescription doit être limitée. Elle ne peut pas excéder 12 semaines dans les formes d’anxiété généralisée ou à évolution chronique (il n’y a pas de traitement d’entretien).
5. La prescription ne doit pas être renouvelée sans une réévaluation clinique préalable.
6. Si la co-prescription de plusieurs anxiolytiques est rarement justifiée, l’échec d’un anxiolytique peut légitimer le changement de classe pharmacologique.
7. L’arrêt d’un anxiolytique quel qu’il soit (Benzodiazépines-carbamates- antihistaminiques) doit toujours être progressif, en prévenant le patient du risque de réapparition transitoire des symptômes initiaux.