Le toucher
Contrairement à l’œil qui peut voir sans être vu et à l’oreille qui peut entendre sans être entendue, la peau ne touche pas sans être touchée.
Difficile pour la peau de toucher sans avoir été touchée
La fréquence, la qualité, la présence du toucher de la mère sont influencées par l’expression des mains qui l’ont touchée à l’aube de ses sens, et dont son corps garde la mémoire.
Mémoire des sens
Nous avons tous vécu l’expérience d’une odeur ou d’un contact qui fait resurgir un évènement ou un visage, avec son cortège | d’impressions agréables ou désagréables ! Quand le corps est soumis à une transformation telle qu’une grossesse, un accouchement, un allaitement, il fait remonter à la surface la | somme des sensations enregistrées lors de «( sa propre vie intra-utérine, puis de sa naissance et de ses années de bébé et d’enfant.
Ces transformations réactualisent, par exemple, la manière dont cet enfant a été nourri au sein ou au biberon, s’il a été bercé, s’il a été peu, mal ou pas du tout touché, peu porté dans les bras, si on l’a laissé pleurer sans répondre à ses besoins…
Nous faisons encore partie des générations qui n’ont pas reçu, étant enfant, leur ration de câlins, de nourriture sensuelle (qui « nourrit les sens »).
Dans cette période de transformation, où la mémoire corporelle est à « fleur de peau », tous ces manques et ces frustrations mal digérés deviennent encore plus lourds à porter. Ils utilisent volontiers le corps comme porte-parole pour exprimer par des « maux » ce que les mots n’ont jamais pu dire. Les maux du dos disent ces mots : « J’en ai plein le dos, c’est trop lourd à porter ».
Peut-on parler de la grossesse du père ?
Ne croyez pas que le corps de l’homme ne soit pas « touché » par cette mutation. Il peut l’être dès la grossesse car, même si le père ne vit pas cet état sur le plan physique, il le perçoit sur le plan symbolique. Beaucoup d’hommes se sentent « enceints », car ils perçoivent une transformation dans leur espace intérieur. Voir leur femme porter un petit réveille parfois leur mémoire de vie intra-utérine, qui peut faire rejaillir des rêves.
La naissance et la période qui la suit fournissent aussi de fortes stimulations de réminiscence de leurs premiers mois de vie. Dans cette période, ils sont nombreux à venir consulter pour des maux du corps, car leur passé de carences affectives, mais aussi celui de leur compagne, pèsent sur leurs épaules. Ils découvrent un peu douloureusement qu’ils ont un corps, et pas seulement une tête.
L’homme et le toucher
Le corps et le toucher sont encore essentiellement le domaine des femmes et des mères. Trop de femmes se plaignent, de la part de leur compagnon, d’un manque de caresses et de gestes tendres qui, pourtant, enrichissent le quotidien de la relation amoureuse. Mais comment l’homme peut-il être caressant s’il a été sevré trop tôt de caresses et de câlins ? Car les hommes, petits, ne sont pas assez touchés : par leur mère dans la crainte de l’œdipe, et par leur père dans celle de l’homosexualité. Cette absence de toucher et d’être touché se perpétue de génération en génération.
Voici ce que peut dire un petit garçon appelé à s’identifier à son père : « Les caresses, les câlins, ce sont les femmes qui les font ; papa n’en fait pas. Moi je veux être un homme, un vrai, comme papa, et je ne vais pas faire des câlins. Sinon, on va me prendre pour une fille. » Pour lui, tout ce qui est d’expregsion féminine est péjoratif et humiliant. Il lui faut le rejeter… Les femmes ont conquis le droit d’affirmer avec fierté leur pôle masculin allié au féminin, alors que les hommes, essentiellement mus par leurs principes masculins, dédaignent toujours le féminin qui est en eux. La grossesse constitue une période privilégiée pour permettre à la femme et à l’homme de se rapprocher de leur corps et de s’y incorporer alors que, souvent, ils sont hors d’eux- mêmes. La relaxation, le massage les aideront à se le réapproprier pour mieux l’habiter .
L’allaitement est un acte du corps qui se prépare pendant la grossesse. Le corps dénoué et renourri ouvrira plus facilement la porte à la vie et au lait.